Qui n’a jamais rêvé d’avoir une baguette magique? Que ce soit pour résoudre un problème qu’on perçoit comme insoluble, évacuer d’un geste la fatigue ou le stress, ou faire que le lave-vaisselle se vide tout seul, on a parfois très envie de faire appel à la magie.
Pour le lave-vaisselle, à part bien éduquer ses enfants et son partenaire de vie, je n’ai pas encore trouvé de solution. Mais pour de nombreuses autres situations, on a une baguette magique intégrée! Elle peut nous aider à évacuer les pensées parasites pour avoir l’esprit clair et focus, apaiser le coeur qui pleure ou dénouer le ventre serré, trouver le sommeil ou au contraire dynamiser notre énergie, équilibrer le système nerveux et activer le système immunitaire, créer un espace intérieur paisible et créatif propice à l’émergence de solutions.
Cette baguette est tellement intégrée à notre système, fonctionnant de manière autonome et inconsciente, qu’elle a perdu de sa magie. En y apportant un peu de conscience et en apprenant à l’utiliser avec subtilité, on réactive tout son pouvoir.
Souffle de vie
Le souffle est le tout premier et tout dernier signe qui accompagne notre vie sur cette terre. La fréquence respiratoire d’un nouveau-né est autour de 40-50/minutes. Ce rythme diminue à mesure que notre capacité pulmonaire augmente, pour se stabiliser entre 12 et 20 respirations par minutes chez un adulte. Pour quelque chose qui nous accompagne tous toute notre vie et qu’on fait même plusieurs dizaines de milliers de fois par jour, il est étonnant de réaliser à quel point de nombreuses personnes ne « savent » pas respirer.
La fréquence, le rythme et l’amplitude respiratoires ont une forte influence sur notre état mental et émotionnel. En apprenant à conscientiser et moduler ces facteurs, on réactive le pouvoir de notre baguette magique.
Respiration et émotions
As-tu déjà remarqué comme chaque émotion a sa signature respiratoire? Quand on pleure, l’inspiration est courte, saccadée, haute, l’expiration longue. Quand on est en colère, la respiration est intense. Quand on a peur, la respiration est retenue.
Fritz Perls, psychiatre et psychanalyste co-fondateur avec son épouse de la Gestalt-thérapie, nous dit que « la peur, c’est l’excitation sans le souffle ». Les réactions physiologiques liées à ces deux émotions sont identiques (augmentation de la fréquence cardiaque, dilatation des pupilles, …), la seule différence étant la respiration: retenue en situation de peur, elle est au contraire plus profonde et intense en cas d’excitation.
Notre état émotionnel et notre corps s’influencent mutuellement, souvent à notre insu. En y ajoutant de la conscience, on peut moduler notre état émotionnel en régulant notre respiration. On le fait d’ailleurs tout naturellement et intuitivement pour les autres, quand on dit à quelqu’un qui a mal ou qui a peur « respire, ça va aller ».
Pranayama, ou la science de la respiration
En Kundalini comme dans les autres styles de yoga, le pranayama occupe une place de choix. Signifiant littéralement l’expansion (âyâm) de l’énergie vitale (prânâ), cette science nous enseigne des techniques respiratoires pour contrôler le mouvement du prana (ou chi chinois) et gérer notre énergie vitale. Et comme le mental suit la respiration, elle est la voie la plus directe pour contrôler notre état mental.
Une respiration de bonne qualité et quantité, qui circule librement, constitue les fondations d’une vie créative et pleine de vitalité. Elle se décompose en deux aspects distincts. D’un côté, il y a la partie chimique liée aux échanges gazeux et au mélange d’oxygène, d’azote et autres composants de l’air. De l’autre côté, il y a la dimension subtile du prana, qui apporte l’énergie au mental, au corps et à la conscience.
De tous les changements positifs qu’une personne puisse opérer, apprendre à respirer profondément et complètement est probablement le plus efficace pour développer une conscience supérieure et pour accroître la santé, la vitalité et le sentiment d’être en lien avec sa propre vie.
-Yogi Bhajan
Fréquences et séquences
Comme mentionné, la fréquence respiratoire « normale » chez une personne adulte se situe entre 12 et 20 par minute. En ralentissant volontairement notre rythme de respiration, on gagne très rapidement un état de mieux-être.
Avec 8 respirations par minute (7-8 secondes par cycle complet), on soulage déjà le stress. La sensation de relaxation, la clarté mentale et la conscience augmentent. Le système nerveux parasympathique, responsable de la détente, la régénération et l’attention calme, commence à être stimulé.
À 4 respirations par minute (15 secondes par cycle complet), les fonctions mentales et perceptives s’affinent. La clarté visuelle, la sensibilité corporelle et la conscience s’intensifient. L’hypophyse et la glande pinéale entrent en collaboration pour produire un état méditatif caractérisé par des ondes alpha.
Quand on respire une seule fois par minute, les deux hémisphères cérébrales travaillent en symbiose. L’anxiété, la peur, tous les soucis s’apaisent de manière impressionnante. Le passage en ondes théta nous permet une ouverture de conscience impossible autrement.
Le ratio inspiration/expiration a également son influence. L’inspiration est liée au système nerveux sympathique, qui accroît notre dynamisme et notre vivacité, notre rythme cardiaque et notre pression sanguine. L’expiration stimule le système nerveux parasympathique, favorisant la digestion et l’élimination, le calme et la relaxation. Notre rythme cardiaque et notre pression artérielle s’en trouvent diminués.
De ce fait, pour augmenter l’énergie vitale, on favorisera l’inspiration longue (4:1). Si on veut améliorer la concentration, on peut utiliser le ratio 8:4. Pour débloquer notre mental, se calmer et lâcher prise, c’est à l’inverse une respiration 4:8 qui sera efficace.
Le nez et les narines
La respiration par le nez est très importante pour notre cerveau. Une partie de l’oxygène passe directement par la lame criblée, une fine lame osseuse criblée de trous située entre le nez et le cerveau. C’est pourquoi, quand on a un gros rhume et le nez complètement bouché, on a aussi l’impression d’avoir le cerveau dans le brouillard. Il ne reçoit tout simplement pas toute l’oxygène nécessaire pour fonctionner à plein régime.
Les narines ont elles aussi toute leur importance. Naturellement, une narine est plus active que l’autre, avec une inversion toutes les 90 à 150 minutes. En choisissant par quel côté l’air passe, on peut contrôler notre humeur et nos énergies.
La narine gauche est traversée par le système nerveux parasympathique. Elle est donc associée à une énergie yin purifiante, rafraichissante et réceptive. Utiliser uniquement la narine gauche favorise le calme, la sensibilité, l’empathie et l’esprit de synthèse.
La narine droite est liée au système nerveux sympathique. Elle stimule l’énergie yang nourrissante, solaire, réchauffante et rayonnante. Son utilisation augmente la vivacité, la concentration, la volonté, la mise en action.
Nadi Shodan pranayama
De nombreuses méditations, comme par exemple la Méditation pour un coeur calme, utilisent activement la respiration et aident à apprivoiser et moduler notre flux respiratoire.
Nadi Shodan pranayama est une respiration qui purifie les nadi, ou courants énergétiques. Ils sont les pendants ayurvédiques (médecine traditionnelle indienne) des méridiens chinois. Cette technique est aussi simple que puissante. En alternant systématiquement les narines, elle engendre une harmonisation du cerveau droite et gauche. Permettant à la fois d’intégrer et de s’enraciner, elle crée un profond sentiment de bien-être physique, mental et émotionnel. C’est également un excellent remède naturel contre les maux de tête, migraines et autres symptômes liés au stress.
Pour pratiquer Nadi Shodan pranayama, installe-toi confortablement dans ta verticalité. Laisse la main gauche reposer en Gyan mudra (pouce et index en contact). Tu vas utiliser alternativement le pouce droit pour fermer la narine droite, et l’index ou l’annulaire droit pour fermer la narine gauche. Commence par obturer la narine droite et inspirer par la narine gauche, puis expire par la narine droite. À la deuxième respiration, inspire par la droite et expire par la gauche. Continue en inversant à chaque respiration: gauche-droite, droite-gauche, gauche-droite, … Le souffle est profond, détendu, complet. Pratique pendant 3 minutes (ou le temps qui te convient), puis reprends le cours de ta journée en savourant ton état intérieur.
La magie de la respiration
Ce qui est vraiment magique avec la respiration, c’est sa disponibilité. Elle est toujours là avec nous, toujours gratuite. C’est un outil qu’on a en permanence sous la main. À moins d’être intubé.e et sous ventilation artificielle, tu as le pouvoir de moduler ta respiration pour influencer ta conscience, ton énergie, tes émotions, ton humeur.
Portes-y attention, expérimente, apprends les techniques de pranayama et deviens expert.e dans l’art d’utiliser ta respiration pour te sentir bien en toutes circonstances.